ENQUÊTE PUBLIQUE DEMANDE D’AUTORISATION D’OUVERTURE DE TRAVAUX MINIERS AU PORT AUTONOME DE STRASBOURG : Avis formulé par l’Association de Défense des Intérêts de la Robertsau, environs et alentours
Voici l’avis formulé par l’Association de Défense des Intérêts de la Robertsau, environs et alentours. Vous pouvez vous en inspirer, mais il ne faut en aucun cas, le copier.
Voici les horaires de présence du commissaire enquêteur :
Le commissaire-enquêteur se tiendra à la disposition du public pour recevoir ses observations aux jours et heures suivants :
A la mairie de Strasbourg (centre administrarif – salle 144 – niveau 0 :
- Le samedi 25 avril 2015 de 9 heures à 12 heures
- Le mardi 12 mai 2015 de 16 heures à 19 heures
- Le lundi 18 mai 2015 de 14 heures à 17 heures
A la mairie de Quartier de La Robertsau – l, rue du Parc – 67000 Strasbourg :
- Le vendredi 17 avril 2015 de 14 h 30 à 17 h 30
- Le jeudi 30 avril 2015 de 9 h 30 à 12 h 30.
En dehors de ces horaires, vous pouvez à tout moment laisser votre avis sur le cahier spécialement à disposition.
L’enquête publique sera ouverte le mercredi 15 avril 2015 et durera 34 jours, soit jusqu’au lundi 18 mai 2015 inclus.
1. Contexte général
Le contexte dans lequel se déroule cette enquête est pour le moins singulier. En effet un permis de recherche Géothermie Haute Température dit de Strasbourg a été délivré à la Sté FONROCHE le 10 juin 2013. Fort de ce permis le Port Autonome de Strasbourg, Présidé par une Vice Présidente de la CUS, aujourd’hui Eurométropole, Madame Catherine Trautmann, a signé un contrat d’autorisation d’occupation d’un terrain situé au centre du Port aux Pétroles de Strasbourg en faveur de la Sté Fonroche.
Le 8 juillet 2013, la Sté Fonroche a déposé une demande d’autorisation d’ouverture de travaux miniers pour 4 forages de gîtes dans le périmètre du permis exclusif de recherche de Strasbourg, dont celui du site du port aux pétroles.
Le 27 avril 2014 un avis de l’Autorité Environnementale concernant ce site était publié, faisant état de nombreuses lacunes dans l’étude d’impact, notamment sur l’analyse de l’état initial, l’étude sanitaire, les impacts réels sur la faune, ainsi que sur les mesures envisagées pour éviter, réduire ou compenser ces impacts.
Le 17 juillet 2014, la Sté Fonroche déposait un nouveau dossier et retirait l’ancienne demande d’autorisation.
Le 21 novembre 2014 un nouvel avis de l’Autorité Environnementale, favorable à la réalisation des travaux miniers, était publié.Il faut noter que le nouveau dossier déposé par Fonroche le 17/07/2014 ne répondait nullement de manière satisfaisante aux observations formulées dans le premier avis.Monsieur le Commissaire Enquêteur pourra utilement établir une comparaison détaillée entre les deux dossiers de demande d’autorisation d’ouverture de travaux pour se rendre compte de cette situation.
Nous ne sommes pas étonné de cet avis favorable, malgré les lacunes du dossier sur lesquelles nous reviendrons. En effet l’Autorité Environnementale est un service de la préfecture. Ainsi le préfet rend un avis de la main gauche et décide de la main droite.Cette situation est contraire aux directives européennes. Dans un arrêt dit « Seaport » la Cour de justice de l’Union Européenne statuait en 2011 que « L’Autorité Environnementale qui évalue les projets doit avoir une autonomie fonctionnelle et la capacité de rendre des avis objectifs »
Ces critères ne sont pas remplis avec le modèle actuel de l’AE, et Madame la Ministre, Ségolène Royale, en convenait encore le 28 mars dernier au congrès de France Nature Environnement.
La singularité de cette enquête publique, est illustrée par une réunion publique organisée par des associations, tenue le 10 mars 2015 dans la salle du Bon Pasteur, au cours de laquelle les candidats aux départementales des cantons 4 et 5 devaient se prononcer pour ou contre la géothermie au port aux pétroles. Les candidats, onze binômes, ont tous répondu « non à la géothermie profonde haute température au port aux pétroles ». Les Dernières Nouvelles d’Alsace du 12 mars, rendant compte de cette réunion écrivaient, « Raison invoquée unanimement: le site fait l’objet d’un PPRT ( plan de protection des risques technologiques), en raison des produits dangereux qui s’y trouvent » La surprise est venue de l’annonce faite par Mr Alain Fontanel, premier adjoint Ville et vice président de l’Eurométropole (avec l’aval du maire Roland Ries et du Président de l’Eurométropole Robert Herrmann, a-t-il précisé) «La ville donnera un avis négatif au projet lors de l’enquête publique…….et par ailleurs elle a déjà informé la Sté Fonroche et la préfecture qu’elle n’achètera pas l’énergie produite au port aux pétroles »
Sans débouchés pour la chaleur, le projet ne peut être rentable, et son financement ne peut être assuré.
QUELLE JUSTIFICATION POUR L’ENQUÊTE PUBLIQUE ?
Il faut encore souligner qu’une Vice présidente de l’Eurométropole, Présidente du port autonome, autorise l’amodiation d’un terrain au port aux pétroles pour la réalisation des forages, alors qu’un autre Vice président annonce qu’en accord avec le Maire de la Ville et le Président de l’Eurométrople un avis défavorable au projet sera donné lors de l’enquête publique.
Le contexte est vraiment singulier.
Dans ces conditions, faut-il s’étonner si la participation à l’enquête publique ne motive pas une part importante de la population ?
2. Les manquements dans le dossier soumis à l’enquête.
« Le permis de recherche s’applique, comme son nom l’indique , aux travaux d’exploration en vue de découvrir les gisements de substances de la classe des mines…. »
Plus clairement, le permis de recherche doit permettre de réaliser des travaux d’exploration, en vue de s’assurer que ce que l’on recherche dans le sous sol existe réellement, et avoir la garantie d’exclusivité en cas de succès. Ainsi la Sté Fonroche aurait dû entre le 10 juin 2013 et l’enquête publique réaliser des études exploratoires pour s’assurer au minimum que des failles existent à la profondeur envisagée, les localiser pour conduire les forages, et que la perméabilité du sous sol permette l’obtention du débit de 350m3/h et une température en tête supérieure à 150°C. Ces éléments nécessitent la réalisation de recherche sismiques pour rassembler des données permettant de réaliser une cartographie des strates géologiques profondes. Ces recherches sont effectuées par des sociétés spécialisées qui ont une longue expérience et du matériel, ainsi que des programmes informatiques, adaptés.
Ces études exploratoires permettent également de déterminer s’il existe des poches de gaz ou de pétrole dans la zone à forer, comme celles découvertes lors du forage abandonné de Cronenbourg dans les années 1980 en raison d’un manque de débit. Fonroche prétend que le risque est quasiment inexistant au port aux pétroles. Si tel était le cas, on peut se demander pourquoi la Sté GEOPETROL a sollicitée la prolongation de la concession d’hydrocarbures liquides ou gazeux sur le territoire de Strasbourg et alentours. Cette demande est à l’enquête publique du 20 avril au 22 mai 2015.
Comme le pétitionnaire est assuré de l’exclusivité de pouvoir exploiter la zone pour laquelle il a obtenu un permis de recherche, il serait naturel que ces éléments des études exploratoires soient intégrés au dossier d’enquête pour que le public puisse connaître précisément la trajectoire des forages, qui peuvent être déviés jusqu’à 700m du point situé en surface. Le fond du puits d’aspiration ou de rejet, sera-t-il situé sous le Rhin, sous la forêt de la Robertsau, sous les maisons, ou ailleurs ?
Qu’en est-il réellement dans les dossiers d’enquête publique ?
L’étude d’impact indique que la description lithologique et structurale est donnée pour le forage effectué il y a plus de 35 ans à Cronenbourg, soit à une distance de 5 400 m du port aux pétroles et à une profondeur maximum de 3200 m. Le document met un point d’interrogation en ce qui concerne la profondeur au delà, montrant l’ignorance de la situation. Il est également fait mention de forages à Kilstett et Hoenheim, plus éloignés. Ces résultats ne préjugent aucunement de la situation réelle au port aux pétroles.
Les autres informations concernant la connaissance du sous sol seraient tirées de la documentation existante. Or les rapports du Bureau de Recherches Géologique et Minière, comme les autres publications énoncées, se rapportent au fossé rhénan en général, et aucunement au site particulier concerné. La méconnaissance des détails géologiques profonds est confirmée par le rapport du
projet transfrontalier GeOrg. Ce projet financé dans le cadre du programme Interreg IV Rhin supérieur (Allemagne, Suisse, France) a pour objectif de mettre à disposition une banque de données rassemblant les informations géologiques relatives aux secteurs allemands, français et suisse du bassin rhénan. GeOrg est un excellent outil pour visualiser globalement le sous sol, mais qui, dans le cadre d’un projet précis ne suffit pas. Il doit être complété par de la recherche supplémentaire locale. L’affichage est limité à l’échelle de quelques kilomètres. S’il faut aller à l’échelle d’un secteur pour un choix précis d’implantation et de trajectoire de forages géothermiques, il faudra obligatoirement chercher des données complémentaires. Acquisition de mesures géophysiques par exemple, qui sont normalement réalisées dans le cadre d’un permis de recherches pour le choix final d’implantation des forages.
Extraits du rapport GeOrg :
Partie 1 – Rapport final page 98
«Les informations synthétisées sur les potentiels géothermiques ….montrent que la partie occidentale de la CUS constitue la zone la plus favorable du point de vue relatif compte tenu de la profondeur et de la température des réservoirs, les informations hydrauliques n’étant pas utilisables… »
« Cette évaluation sur le territoire de la CUS a permis de réaliser une synthèse des connaissances géologique et hydrogéologique, et de mettre en exergue le manque de données de perméabilité des réservoirs qui permettraient de prévoir les débits attendus lors de la réalisation d’un doublet géothermique. »
Ce même rapport indique que l’eau est souvent présente dans le Buntsandstein, mais les débits naturels n’apparaissent pas suffisants. « ces réservoirs potentiels apparaissent comme des réservoirs fracturés. Il est donc indispensable d’avoir une très bonne connaissance de la géologie profonde afin de déterminer leurs caractéristiques intrinsèques, en particulier la géométrie détaillée du réseau de fractures qui les découpe. »
Le Buntsandstein est situé entre -2701 et -3166 m, au dessus du Permien qui descend jusqu’à une profondeur de 3220m.Pourquoi le projet prévoit de descendre les forages jusqu’à 4200 mètres dans un terrain apparemment inconnu ?
Pour le moins les éléments qui permettraient cette connaissance précise de la géologie profonde manquent au dossier d’enquête publique. Il est fort probable que ces éléments ne sont pas à la disposition de Fonroche. Il est alors à craindre que les forages s’effectuent à l’aveuglette, mettant en oeuvre tous les moyens envisageables pour obtenir le résultat recherché. Le principe de précaution indispensable au milieu de 415 000 m3 de produits inflammables sera alors le dernier des soucis d’une société ayant investit plus de 10 millions, qui voudra à tout prix rentabiliser son investissement.
Les fissures et leurs interconnexions, si elles existent, étant inconnues, il faudra en créer, provoquant un remaniement du sous sol sous contraintes. Qui peut maîtriser une telle situation ?
En ce qui concerne les débits attendus (350m3/h), il est peu probable qu’ils soient atteints. Comme l’indique le rapport GeOrg, c’est la partie occidentale de l’Eurométropole qui est la plus favorable, et non la partie orientale.Les débits obtenus par les forages réalisés à ce jour dans le fossé rhénan sont les suivants :
LANDAU : 180 à 252 m3/h
BRUCHSAL : 87 m3/h à 123°C
BÂLE:227m3/h
NEURIED : prévision 270m3/h
SOULTZ : 110m3/h après 3 années de stimulation (nettoyage des failles à l’acide)
Dans tous ces projets la pression de nettoyage des fissures a largement dépassée les 100 bars que Fonroche prétend accepter comme limite. Comme nous ne pouvons avoir confiance dans le contrôle de la DREAL (voir chapitre PPRT ci dessous), il est à craindre que les manipulations auxquelles se livrera FONROCHE pour permettre l’exploitation du site, créeront les conditions de sinistres pour les entreprises du port comme pour ses riverains.
Il nous semble qu’un avis défavorable s’impose pour le projet, trop d’éléments de réalisation étant inconnus à l’heure actuelle, alors que la Sté FONROCHE disposait de près de deux années pour les rassembler et établir un programme de travail détaillé qui devrait figurer dans le dossier d’enquête.
3. La société FONROCHE.
Elle se présente elle même comme nouvel acteur industriel de la région Alsace, et prétend porter un intérêt majeur dans le développement des énergies renouvelables de l’Alsace, en envisageant plusieurs projets de centrales géothermiques sur l’agglomération de la CUS (Communauté Urbaine de Strasbourg).
Elle est tellement nouvel acteur, qu’à ce jour elle n’a réalisée aucune installation de géothermie profonde. Ses associés allemands dans GEOSTRAS sont des sociétés dont l’expérience est limitée aux forages. Ce sont le choix de la trajectoire pour les forages et la stimulation ultérieure qui présentent le plus de risques. L’absence d’expérience est inquiétante.
Le bilan de Fonroche est déséquilibré et indique des pertes pour 2012 (-3477 K€) et 2013 (- 1287K€).
Comment faire confiance à cette société pour des projets de l’ordre de 60 M€ par site, soit 240 M€ pour les 4 sites strasbourgeois prévus à court et moyen termes ?
4. Le Plan de Protection des Risques Technologiques. PPRT
En novembre 2013 le Préfet de région à mis en vigueur un plan de protection des risques technologiques au port aux pétroles de Strasbourg. Le site du forage est inclus dans le périmètre du PPRT.
Ce PPRT est actuellement en instruction au Tribunal Administratif de Strasbourg, l’ADIR ayant porté recours. Deux autres associations ont également individuellement porté recours.
L’ADIR se fonde sur le fait qu’un certain nombre de risques réels n’ont pas été pris en compte dans le projet de PPRT, sous prétexte que des moyens de maîtrise de ces risques (MMR) ont été mis en place, et que les textes prévoient que dans ces conditions ils peuvent être exclus du PPRT. L’ADIR conteste l’existence de ces MMR, et prétend que même s’ils existaient, les textes ne permettent pas l’exclusion de ces risques du PPRT. Notre position a été confortée par
- le rapport de l’Inspection des installations classées du 13 octobre 2014 concernant Wagram Industries
- l’arrêté préfectoral du 4 novembre 2014 interdisant l’utilisation de l’appontement Wagram Industries pour des liquides inflammables de catégorie B
- le rapport du 3 mars 2014 de l’Inspection des installations classées faisant état de graves dysfonctionnements au niveau des mesures de sécurité à l’appontement Rubis Terminal
- l’arrêté préfectoral du 12 mars 2014 montrant que le risque de fuite d’une duréesupérieure à 2 minutes pour la rupture guillotine du bras de chargement de Rubis Terminalne pouvait être exclue à la date d’approbation du PPRT
- le rapport de l’Inspection des installations classées du 6 février 2014 et l’arrêté préfectoraldu 4 décembre 2014 pour Rubis Terminal, qui confirment que les MMR en place ne permettent pas de diminuer la probabilité d’un UVCE par débordement de bac et que le
risque doit être intégré au PPRT.
C’était à la DREAL de vérifier que les conditions réglementaires étaient assurées pour exclure ces risques du PPRT. Pour le moins elle a manquée d’indépendance.
Dans ces conditions il y a un risque sérieux de voir annuler le PPRT actuel par le TA de Strasbourg. Il faudra donc revenir au projet de PPRT de 2010. Celui-ci ne permettrait en aucune façon la réalisation des forages qui se trouveraient en zone rouge foncé R où le principe d’interdiction est la règle.
Peut on prendre le risque d’investir des dizaines de millions d’Euros sur un site sur lequel pèse de telles incertitudes. En cas d’annulation du PPRT actuel, qui couvrirait les investissements déjà réalisés ?
5. Etude d’impact
La destruction, l’altération ou la dégradation des sites de reproduction et des aires de repos d’espèces patrimoniales est interdite sur le plan européen. Fonroche reconnaît un impact significatif de son projet sur le lézard des murailles et 11 espèces d’oiseaux protégées qui ont été recensées sur le site du forage. Le dossier ne propose aucune protection et remet à une phase ultérieure l’étude de mesures compensatoires.
Il n’est pas possible de donner un blanc seing à une société qui montre que, pour réduire les dépenses, elle est prête à agir dangereusement, sans connaissance approfondie du site au préalable.
Comme déjà indiqué, les fissures et leurs interconnexions, si elles existent au droit des forages, sont inconnues. Leur nettoyage à l’acide provoque un remaniement du sous sol sous contraintes que personne ne peut maîtriser. L’étude d’impact n’en fait pas mention.
L’affirmation «Le programme de travaux prévu permet donc de maîtriser le risque de contamination de l’aquifère de surface par des eaux d’autres aquifères ou par le fluide géothermique.” ne peut se justifier par les mesures de cémentation prévues. A Landau c’est une fuite à faible profondeur qui a provoquée les soulèvements de terrain, la courbure d’une voie ferrée et des ouvertures dans les routes. Aux USA, une étude récente a montrée que la pollution des nappes phréatiques étaient provoquées en tête des puits, et non par la remontée de méthane du fond des forages. En effet les tubes de forage se corrodent sous l’effet de la saumure circulant (3x la salinité de l’eau de mer à une température de 180°C). Un béton n’est pas étanche et se fissure sous l’effet des centaines de micro séismes annuels. C’est un risque énorme pour la plus grande nappe phréatique européenne, située à quelques mètres de profondeur et approvisionnant des millions d’habitants.
L’affirmation de maîtrise est purement gratuite, ne reposant sur aucune expérience de longue durée. Soultz sous Forêt ne peut être cité en exemple, du fait de l’absence de nappe phréatique.
La sismicité induite par ce type de projet, résulte des interactions hydromécaniques entre les circulations du fluide, le réseau de fractures et les champs de contraintes locales, induisant une modification des champs de pression dans le sous sol. Le BRGM reconnaît « tous les sites de géothermie profonde dans le monde ont dû faire face à l’occurrence de micro-séismes pouvant être ressentis par les populations avec des conséquences parfois néfastes. Le phénomène de sismicité induite, bien que connu, n’est pas encore complètement compris par les scientifiques »
Le champ de contraintes locales au port aux pétroles n’est ni connu, ni estimé. Le risque par
rapport aux cuves de stockage et à la tuyauterie, souvent mal entretenues, n’est pas étudié.
En cas de sinistre sur le bâti, aucune assurance ne couvre les dégâts. Encore faut-il pouvoir prouver que les travaux sont à l’origine du sinistre pour que l’État, officiellement assureur en dernier ressort pour les travaux miniers, les prenne en charge. L’expérience de dégâts occasionnés par des travaux miniers, montre qu’après épuisement des juridictions successives et appel aux juridictions européennes, plus de 10 années se sont écoulées avant un rendu de décision. Le coût de telles procédures est prohibitive pour un particulier.
6. Santé et Sécurité
Le document admet un risque d’explosion lié à la présence de méthane (CH4) qui pourrait s’accumuler dans des zones proches des puits et des lignes de boues.
Peut-on admettre un tel risque à proximité immédiate des 415 000m3 de stockage de produits chimiques et pétroliers inflammables ?
La remontée éventuelle de gaz lors des forages n’est évoquée qu’accessoirement. Les mesures prévues ne permettent nullement d’éviter une explosion. Pourtant cette éventualité doit être envisagée compte tenue de l’expérience de Cronenbourg et de la demande de GEOPETROL (voir §2)
« Les fondements industriels et les connaissances du Fossé Rhénan issues des 25 ans de recherche industrielle sur le site européen de Soultz-Sous-Forêts seront mis à profit dans la réalisation de ces doublets géothermiques et en particulier dans l’approche de la partie concernant la fissuration du socle et la gestion des contraintes environnementales. » Une telle affirmation est étonnante. Fonroche est concurrente de l’Electricité de Strasbourg, maître d’oeuvre du projet de Soultz. Ces sociétés se gardent bien d’échanger leurs informations et les connaissances acquises. Plus encore la mention de fissuration du socle vient en contradiction avec toutes les affirmations des documents de l’enquête, qui assure que la fissuration n’est pas envisagée dans le projet du port aux pétroles.
Dans un document Foire aux questions édité par Fonroche , nous relevons :
Le fluide utilisé dans l’unité de production d’électricité sera un fluide frigorigène R134A ou R245FA.
Le R134a est interdit d’usage dans l’Union Européenne. Comment Fonroche n’est elle pas au courant d’une telle interdiction ?
Dans le document sécurité du R245FA, le producteur Honeywell précise qu’il peut former un mélange combustible avec l’air à une pression supérieure à la pression atmosphérique. C’est bien la situation qui peut arriver dans le circuit de la turbine.
On ne peut qu’être étonné de la légèreté avec laquelle ces questions sont traitées par le pétitionnaire. A elles seules elles devraient conduire à un avis défavorable au projet.
7. Information des citoyens
Ni les autorités préfectorales, ni les autorités municipales n’ont jugées utiles à ce jour de prévoir une information des citoyens sur le projet, ses risques et son déroulé. Les documents du dossier soumis à l’enquête comportent près de 600 pages. Peut on espérer que les citoyens lisent ce dossier pour se faire une idée sur la géothermie profonde, et surtout comprennent la technicité des opérations prévues ?
Il semblerait normal que préalablement, ou au minimum dès le début de l’enquête, une réunion d’information, de vulgarisation et de discussion avec le public soit organisée pour permettre aux citoyens désireux d’apporter leurs observations, d’être correctement informés.
Les scientifiques déclarent la géothermie profonde comme technique non mature. Son développement éventuel passe par la continuation de recherches scientifiques. Les risques de l’appliquer au milieu du port aux pétroles, ajoutant de nouveaux risques aux risques préexistants, ayant conduit à la mise en place d’un plan de protection des risques technologiques (zone SEVESO seuil haut), semble irresponsable.
L’absence d’information préalable des citoyens pour la mise en oeuvre d’une technique non mature est une raison majeure d’avis défavorable à ce projet.
Pour l’ADIR
2 réflexions sur « ENQUÊTE PUBLIQUE DEMANDE D’AUTORISATION D’OUVERTURE DE TRAVAUX MINIERS AU PORT AUTONOME DE STRASBOURG : Avis formulé par l’Association de Défense des Intérêts de la Robertsau, environs et alentours »
Bonjour,
Je suis adhérent de l’Adir ;
Je suis allé en mairie de quartier pour regarder le dossier (c’est vraiment très difficile vu la technicité de celui-ci de l’étudier à fond sur le bureau de l’employée de mairie qui me l’a remis ! )
Merci de vos observations; elles me serviront pour mes propres observations sur le registre.
Comme vous, je déplore absolument le manque d’information des citoyens sur ce projet qui peut avoir des conséquences importantes sur le quartier.
Bonjour,
je m’interesse de très près au développement de la géothermie en Alsace (et des énergies renouvelables en général). Je comprends les inquiétudes des gens qui vivent à côté de projets nouveaux dont ils n’ont pas (ou pas facilement) les éléments pour comprendre les risques potentiels mais je pense aussi que le syndrome NIMBY (NOT IN MY BACKYARD « pas dans mon jardin ») est aussi grave que le déni de démocratie décrié ici.
Aussi il convient d’être précis. A titre personnel, je m’interroge sur 2 affirmations que vous portez dans le paragraphe 6.santé et sécurité.
1) le fluide R134a n’est pas interdit dans l’union Européenne. J’ignore d’où vous tenez cette information mais elle est erronée.
Le R134a est un fluide réfrigérant de la famille des HFC. Il est utilisé dans la grande majorité des groupes de climatisation et pompes à chaleur, y compris pour les particuliers. Si vous avez une pompe à chaleur chez vous ou une climatisation à votre bureau vous pourrez vérifier. Il est non toxique, non inflammable (pas de point éclair), il n’attaque pas la couche d’ozone et il est produit en de très grandes quantités de part le monde.
Le seul défaut de cette substance est que son pouvoir à effet de serre est important (1 tonne dans l’atmosphère équivaux à environ 1000 CO2 pour l’effet de serre), ce qui fait que les utilisations diffuses (je précise ici diffuses) de ce produit conduisent à contribuer à l’effet de serre quand les appareils ne sont pas contrôlés de manière rigoureuse lors de leur exploitation et surtout lors de leur fin de vie.
Pour cette raison, l’UE a émis un règlement (Règlement (UE) n° 517/2014 du 16/04/14 relatif aux gaz à effet de serre fluorés et abrogeant le règlement (CE) n° 842/2006) qui propose la réduction progressive de l’utilisation et de la production de ces substances (à fort pouvoir effet de serre). A terme, le R134a sera remplacé par des fluides nouvelles générations comme le R1234ze par exemple (dont le pouvoir effet de serre est de l’ordre de 5).
En ce qui concerne les installations industrielles (non diffuses), celles-ci sont régies entre autre par le code de l’environnement et la règlementation des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement. Pour les installations utilisant le R134a (ou le R245fa) il s’agit de la rubrique 4802 – Gaz à effet de serre fluorés visés par le règlement (CE) n° 842/2006 ou substances qui 4802 appauvrissent la couche d’ozone visées par le règlement (CE) n° 1005/2009 (fabrication, emploi, stockage), Alinéa 2 Emploi dans des équipements clos en exploitation, alinéa a) … soumise à Déclaration et Contrôle.
Ainsi le R134a n’est pas interdit en Europe. Il n’est pas dangereux pour les habitants à proximité ou les sites industriels.
Son utilisation peut poser le problème des émissions de gaz à effet de serre pour les systèmes diffus mais la règlementation impose aux unités industrielles des contrôles pour limiter les fuites éventuelles.
2) Le R245fa est lui aussi un fluide de la famille des HFC (avec donc les mêmes implications vis à vis des impacts potentiels sur l’effet de serre).
Je m’interroge sur votre mention de dangerosité. Le R245fa en tant que tel n’est pas inflammable. il ne possède pas de point éclair.
Ce qui est possible, c’est qu’au de la d’une température/pression extreme le fluide soit détruit et que des sous composés soit alors inflammables. la fiche de sécurité (chercher MSDS R245fa sur internet) mentionne d’ailleurs que
« This product is not flammable at ambient temperatures and atmospheric pressure.
However, this material can ignite when mixed with air under pressure and exposed to strong ignition sources »
Dans ces conditions, il convient de regarder :
– la température/pression à laquelle le R245fa peut se décomposer (s’il y a lieu) ou former un mélange inflammable;
– les conditions (mélange avec l’air à haute pression et exposition à une source d’ignition forte) sont elles réunies ici ?
– Est ce que cette température est atteinte dans le cadre du procédé mis en jeux ? si non peut elle être atteinte dans un cas de défaillance particulière?
– quelle est le niveau requis pour la source « d’ignition »
– Si la propagation d’une combustion de sous-produits de décomposition se propage de la phase gaz à la phase liquide;
A très haute température, beaucoup de choses deviennent « » » inflammables « » », à priori l’intégralité des choses que l’on peut avoir dans son logement, son bureau ou sa voiture. Un parking de 30 voitures est certainement plus « inflammables » et dangereux qu’un stock de R245fa, pourtant personne ne s’en offusque.
Ainsi, l’utilisation du fluide R245Fa peut sous certaines conditions présenter un certain nombre d’impact voire de danger, mais il convient de vérifier si c’est le cas avant d’indiquer que ça l’est.
Mon propos n’est pas de dire que ces projets sont sans danger et qu’il faut faire confiance aveugle à ce que l’on nous explique. Il est sain que les citoyens se posent des questions et cherchent des réponses.
En revanche, il faut faire attention à ce que l’on reproche et en tant que citoyen ne pas désinformer ou transmettre des informations fausses ou incomplètes. Attention donc à ne pas agiter le chiffon rouge sans raison.